Pierre Demont avait 20 ans à la Libération
Pierre Demont avait 20 ans à la Libération
Pierre Demont est né à Gentilly en 1924.
Il grandit dans une famille modeste. Son père Louis et sa mère Marie sont enseignants. Il a une sœur aînée, Christiane.
La famille arrive à Fontenay au début des années 30 et habite au 12 de la rue Mallier. Il fait sa scolarité à l'école de Jules-Ferry.
Le père raconte avec émotion, dans une longue lettre le parcours de son fils, Pierre, pendant la Deuxième Guerre mondiale.
Dès l'âge de 16 ans, Pierre pense déjà à rejoindre Charles de Gaulle en Angleterre pour lutter contre les Allemands et les repousser de notre territoire. A cause de son jeune âge et de la dangerosité de la situation, ses parents arrivent à l'en dissuader. Pierre n'abandonne pas son projet.
Le 20 novembre 1943, il envoie un télégramme de la gare de Lyon à ses parents pour les informer: il prendra le train jusqu'à Marseille, il passera clandestinement en Algérie, il rejoindra les troupes françaises libres. Il les met ainsi devant le fait accompli car ils auraient à nouveau cherché à le retenir.
Les côtes du Sud de la France sont très surveillées, Pierre décide de passer par l'Espagne.
Dans une lettre à ses parents, il explique qu'il va affronter seul les Pyrénées, sans arme et sans vivres car il n'a trouvé personne pour le guider.
A 500 mètres de la frontière, alors qu'il traversait un tunnel, Pierre est arrêté par les Allemands.
Il est emprisonné à Perpignan.
On essaye de le faire parler en le frappant à coup de nerf de boeuf. On trouve sur lui sa carte d'identité et une liste de camarades de sport de Fontenay.
L'idée qu'ils puissent être inquiétés le torturait plus que les coups qu'il recevait. Profitant d'un moment de distraction du chef allemand, il avale cette liste empêchant ainsi à ses copains d'être à leur tour interrogés.
Il essaye de s'évader de prison; il crée une diversion en jetant un seau d'eau dans les jambes d'une sentinelle. Il s'élance en courant dans les rues de Perpignan, se cache derrière une maison. Une femme le voit et le dénonce aux autorités. Repris, garrotté, il est jeté à nouveau en cellule.
Quelques temps après, il est envoyé à Compiègne, camp de transit et d'internement. Au court de son transfert en train, il s'évade après des efforts inouïs. Il réussit à se débarrasser de ses menottes et à sauter du train lors d'un ralentissement, en pleine nuit. Il longe la voie ferrée sans se faire voir et se retrouve à marcher au hasard dans les rues de Paris. Dès qu'il aperçoit une patrouille allemande, il se cache derrière un arbre.
Sa carte d'identité est restée entre les mains des autorités de Perpignan qui connaissent donc l'adresse de son domicile. Il est dangereux de rentrer chez lui, à Fontenay.
Pierre choisit alors un hôtel à Bastille d'où il contacte ses parents. Ces derniers viennent le chercher et le conduisent chez des amis, pour le mettre en sécurité. Pierre trouve du travail dans une entreprise parisienne qui exploite du bois dans l'Yonne. Dans cette entreprise, un réseau important de résistants est en place. Le jeune Pierre y entre évidemment mais ne parle jamais à ses parents de ses actions de résistant.
Il revient avec un ami. Ce dernier veut aussi aller rassurer sa mère. C'est à cette occasion qu'une voisine leur fait part de ses inquiétudes pour sa petite-fille. Elle doit retourner chez ses parents à Paris. Les conducteurs de vélo-cars refusent de l'y conduire car la situation est trop dangereuse. Des barricades empêchent la circulation. Y aller seule à pied n'est pas mieux. Il y a des tirs de fusils et de mitraillettes de tous côtés. La fillette risque de recevoir une balle perdue. Pierre Demont se charge de l'accompagner jusqu'au Château de Vincennes.
De là il croise un camion de F.F.I. partant en direction de Joinville-le-Pont. Les Allemands ont l'intention faire sauter le pont. Les résistants sont en route pour rejoindre des camarades qui se trouvent dans une situation désespérée. Spontanément Pierre leur propose de leur prêter main forte et monte dans le camion. Il se bat toute l'après-midi contre des Allemands, des S.S. nombreux et bien armés. Il a l'idée de les prendre à revers et traverse en barque la Marne pour transporter des munitions. C'est au cours du second voyage alors qu'il met tout juste le pied sur la rive qu'une balle l'atteint dans le ventre.
Un combattant le prend dans ses bras pour le transporter à l'arrière. Pierre lui dit alors: "Je suis heureux de mourir ainsi". Il décède quelques minutes plus tard.
Dans ce récit, son père conclut ainsi: " il avait réalisé son idéal: contribuer à chasser les Allemands hors de France". Il reçoit la Médaille Militaire à titre posthume en 1950.
Pierre Demont est enterré au cimetière de Fontenay-sous-Bois, 10e division, 2e allée, 4e gauche.
La ville a voulu lui rendre hommage et a donné son nom, en 1954, à une rue et l'année d'après à l'école de l'avenue du Maréchal de Lattre de Tassigny.
Un dossier est archivé à Vincennes, au Service historique de la Défense, fonds du Bureau de la Résistance, chargé de la validation des services militaires dans la résistance, sous-série GR 16 P, cote 17 4103.