Archives municipales - Patrimoine - Fontenay-sous-Bois

Eugénie Potonié-Pierre, femme d'avenir

une Fontenaysienne déterminée

D’origine bretonne, Eugénie Pierre (1844-1898) grandit dans un milieu lettré. Elle partage avec son père les idées de Charles Fourier (1772-1837), précurseur du socialisme et du féminisme français. Ce dernier promeut la création des crèches car elles permettent aux femmes de travailler tout en ayant des enfants, favorisant ainsi l’émancipation féminine.

Eugénie quitte la Bretagne pour gagner Paris et sa région vers les années 1880. Elle est petite, brune, timide. Sa photographie, le doc du mois, parue dans le journal du Monde illustré est prise lorsqu’elle a 51 ans. Derrière cet air un peu revêche et réservé, se cache une femme déterminée, engagée depuis près de 25 ans pour la cause pacifiste, socialiste ; elle apporte surtout un point de vue féministe sur des questions d'ordre général.

Les femmes militantes qui la côtoient, la disent courageuse, honnête, sincère, hardie … Elle est douée pour l’éloquence.

A Fontenay, elle habite avec son compagnon, Edmond Potonié, écrivain, militant pacifiste, au 9 de la route de Montreuil (avenue de Stalingrad actuelle). Ils ne sont pas mariés ; ses principes lui interdisent le mariage légal mais ils signent leurs écrits militants « Potonié-Pierre » ou « EPP ». Dans le nouveau quartier des usines Rigollots, Eugénie est appréciée. C’est la bonté même dit-on. Ses modes d’action sont pacifistes. La parole et l’écrit sont ses armes de persuasion.

Elle participe ou organise des Congrès internationaux féministes à Paris et Bruxelles. Lors de celui de 1878, elle défend, avant la promulgation des lois Jules Ferry, l’instruction gratuite, obligatoire et laïque.

1891 est une année importante pour elle. Elle crée la Fédération française des sociétés féministes qui, à l’origine, regroupe huit associations de défenses des droits de la femme. C'est la première fois que le terme féministe est utilisé dans le nom d'une association.

Les personnes appartenant à ce mouvement considèrent que la présence des hommes doit être acceptée alors que de nombreux autres groupes étaient exclusivement féminins.

La Fédération prépare des cahiers de doléances féminins dans lesquels se retrouve le droit de pratiquer tous les métiers et le retrait du code Napoléon de tous les articles qui marquent la soumission des femmes.

Eugénie Potonié-Pierre demande l’admission des femmes dans les jurys d’assises. En 1895, elle réclame dans une pétition l’abrogation de l’article 324 du code pénal qui excusait le meurtre commis par le mari dans le cas de flagrant délit d’adultère.

En essayant de s’inscrire sur les listes électorales ou de se porter candidate aux élections législatives, elle marque son soutien au mouvement suffragiste et aux droits civiques et politiques des femmes. La Préfecture de la Seine refuse à chaque fois de lui donner un récépissé de sa candidature.

Elle intervient également sur les tenues vestimentaires : elle souhaite développer l’usage des jupes-culottes et critique « l’humiliante galanterie », qualifiée « d’estampille du servage ».

Nous la retrouvons en 1896, au Congrès international féministe, à Paris dans le quartier Saint-Michel.

Le doc du mois est un article du monde illustré relatant les séances de ce congrès. Le ou la journaliste en profite pour dresser le portrait des principaux acteurs de ce rassemblement : un homme et 11 femmes dont Eugénie Potonié-Pierre. Notons dans cet article un passage du discours d’ouverture du congrès par Maria Pognon : En 1896, une femme est considérée comme mineure dans le code civil mais peut, d’après le code pénal, être condamnée à la guillotine !

Eugénie Potonié-Pierre décède, à Fontenay-sous-Bois, le 12 juin 1898 des suites d’une hémorragie cérébrale. On retrouve son acte de décès dans les registres de l’état civil de Fontenay-sous-Bois. Elle est incinérée au Père-Lachaise et se cendres se trouvent à la 87ème division du columbarium.

Pour en savoir plus, un livre de Laurence Klejman et Florence Rochefort, L'égalité en marche. Le féminisme sous la Troisième République, Paris, Presses de la FNSP et éditions des Femmes, 1989.

A la bibliothèque Marguerite Durand, un dossier "Potonié-Pierre, Eugénie" vous permet de compléter le sujet, cote 091 POT - LA-00815, 3 lettres autographes signées.

Partager sur